Des murs et des fenêtres
Crédit photo : Samer Mohdad, "Mes Ententes", Liban.
Textes des ateliers d’écriture
animés par Salma Kojok
Avec des
étudiants
d’Egypte, de
Jordanie, de Palestine, du Liban
Organisés par l’AUF et l’IF
A partir de
l’œuvre lauréate du Choix Goncourt de l’Orient 2019
« Le ciel par-dessus le toit » de
Nathacha Appanah
LISTE DES AUTEUR-E-S :
-Nada Ayman ABDEL
WAHAB, Université d'Alexandrie, Egypte
-Hania AHMED
IBRAHIM FAHMY ZEKRY, Université d’Alexandrie, Égypte
-
Khawla ALJABERY, Université de Jordanie,
Jordanie
-
Reem ALNATOUR, Université Al Zaitounah,
Jordanie
-
Cybelle AOUN, Université Saint-Joseph,
Liban
-
Assala AWAD, Université de Birzeit,
Palestine
-
Lina AYOUB, Université Jinan, Liban
-
Chantal BITAR, Université de Balamand,
Liban
-Mirna BOU NASSIF, Université Islamique, Liban
-Tarek BOU OMAR, Université Libanaise, Liban
-
Ghada DAMAA, Université de Balamand,
Liban
-
Farah DHAYBI, Université Jinan, Liban
-
Mohamad DIRANY, Université Libanaise,
Liban
-Démiana EL KESS TAKLA, Université d'Alexandrie,
Égypte
-Rola ELNAGGAR,
Université d’Alexandrie, Egypte.
-Reta ELSHAMI,
Université de Jordanie, Jordanie
-
Malak EZEDDIN, Université Al Zaytouna,
Jordanie
-
Mariam FATHY, Université d’Alexandrie,
Égypte.
-
Tamara HAYEK, Université Libanaise, Liban
-
Chaza HINDI, Université Jinan, Liban
-
Asya KAMAL, Université de Birzeit,
Palestine
-
Joy KHALLOUF, Université Saint-Esprit de
Kaslik, Liban
-
Dina MAKKI, Université Islamique, Liban
-
Laura Maria MIKHAYEL ELIAS, Université
Saint Joseph, Liban
-
Sara MOHAMED AHMED, Université
d’Alexandrie, Egypte
-
Nour Eldine MOSTAFA HAGUAR, Université
d'Alexandrie, Egypte
-
Lili NAIM, Université Saint Joseph, Liban
-
Reema OMARI, Université de Jordanie,
Jordanie
-
Rita RAAFAT, Université d'Alexandrie,
Égypte
-
Imane RMAYHI, Université Jinan, Liban
-
Samar SAWAAN, Université Libanaise, Liban
«
Un paysage de riens et de mousses »
Cybelle
AOUN,
Université Saint-Joseph,
Liban
Solène avait un rêve. Elle voulait
s’allonger sur l’herbe fraîchement coupée, fermer les yeux et sentir chaque
atome de son corps rejoindre la terre. Sentir l’air sur sa peau blanche, sur
son cou et ses jambes nus. Sentir l’humidité de la terre tâcher son dos et la
paume de ses mains. Elle rêvait de quitter le monde des Hommes, elle voulait simplement
fusionner avec la nature. Son rêve, c’était le calme, la passivité et les longs
bains ensoleillés. S’émanciper : c’était le verbe qui habitait sa tête.
Revenue dans la réalité, elle prit
conscience que sa vie s’effondrait d’un coup. Ses larmes ne pouvaient rien
faire d’autre que ruisseler sur ses joues. Son esprit semblait naviguer dans un
vide sans fin. La croix qu’elle portait était celle du manque. Sa condamnation se
complétait par l’espoir éternel en l’avenir.
Elle regardait le mur qui s’écroulait. Ce mur sur
lequel elle avait vécu son premier baiser. Et comme une gifle raide, les
souvenirs calmes mais malheureux posèrent encore plus de larmes dans ses yeux,
une boule dans la gorge et un poids sur sa poitrine. Elle murmura, comme pour
se protéger de ses propres mots “Je ne savais pas ce que je faisais”.
Ce mur était une ombre qui la poursuivait et
l’envie de retrouver ses lèvres pulpeuses augmentait sans arrêt. Partout où
elle allait, et peu importe avec qui elle traînait, c’était lui l’empereur de
ses pensées. Depuis, cette scène est restée immobile, l’odeur de la mousse
humide sur le vieux mur de pierres anciennes habitait ses narines, la fraîcheur
de l’air parcourait encore ses cheveux ondulés et les petits bruits des
grillons chantonnaient toujours dans ses oreilles. Ce moment au clair de lune
était le plus magique de sa vie, elle se retrouvait absorbée par le passé. Je
suis certaine qu’elle abandonnerait toute sa vie pour le respirer encore une
fois.
Aujourd’hui, après tant d’années, elle aimerait le
contacter afin de remuer la naissance de leur histoire. Elle aurait aimé
retisser le lien étroit et inébranlable d’autrefois. Elle lui aurait dit : Tu
m’as connue quand j’étais jeune, tu avais foi en nous et tu étais le plus fort
...Tu sais, pour toi, le pont est toujours là. Le chemin a toujours été ouvert
et il le sera toujours, même si tu habites sur un autre continent. Tu as
toujours eu les bons mots à dire. Et quand les choses reposaient sur mes
épaules, mon saboteur intérieur était vainqueur à chaque coup. La construction
de notre relation était un drame, une histoire complexe, une abomination pour
certains et une merveille pour d’autres. Il est vrai que, de ma part, le pont
était fragile et je regrette amèrement ne pas l'avoir mieux construit. Il faut
avouer que je ne savais pas ce que je faisais quand j’étais jeune. J’étais
perdue, innocente et manipulée. Notre histoire, je veux la revivre et surtout
l’améliorer ; alors, j’attends que nous partions enlever le cadenas rouillé
pour démarrer sur une page blanche.
Elle fut ébranlée dans son monde par une
notification texto sur le téléphone “Tu es au courant qu’IL est au Liban ?”.
C’était sa meilleur amie, Luciole. Solène fut stupéfaite par ce qu’on venait de
lui annoncer. Elle se figea. Plus aucune pensée ne traversa son esprit, sauf
une question. Une question qui criait de plus en plus fort en elle. “Pourquoi, POURQUOI
? Pourquoi ne m’a-t-il pas contactée ?”.
Elle s’était installée à la fenêtre pendant trois
jours. Elle l'attendait. Elle espérait le voir courir vers elle. Elle regardait
au dehors et contemplait un paysage pour les muets, un paysage immense fait de
riens et de mousses. Le calme, une tempête nouvelle. Aucun repos.
*****
«
Souvenirs »
Asya KAMAL,
Université de Birzeit, Palestine
Elle touche le mur comme si c’était un livre de
souvenirs
Comme un journal intime où elle cacherait ses
faiblesses
Debout entre elle et son futur, ce
mur lui murmure Il lui dit de revoir ses actes et de les corriger
*** Le dernier
pont d’amitié est cassé
Perdue comme une plume sur l’eau
Elle a commis une erreur avec son meilleur ami
Le retour au passé semble impossible
***
Laura avait des rêves
Le monde lui a tourné le dos
Elle est paralysée, elle suffoque
Les larmes du chagrin remplissent ses yeux en amande
***
C’était un jour très sombre, long, presque
interminable Après le départ de son meilleur ami, elle a senti le monde s’assombrir
Au crépuscule, elle a perdu tous ses sens et
sentiments
Tellement vide, qu’à la mer morte elle
était semblable
Elle s’est jetée dans son lit, pensant à
cette scène inoubliable
Elle se perdait dans sa propre tête
étourdie, elle n’était plus valable
***
Désespérée, elle regarde par la fenêtre
A ce moment, elle reçoit un appel d’une
source inconnue
L’étincelle d’espoir lui revient
La lumière lui est rendue
Une opportunité de vie, à son ami, est redonnée
***
Pour Laura, le pont est toujours là
L’obscurité vient de s’effacer
Son monde n’est plus sombre
Tu veux encore rencontrer ton ami ?
Certainement, c’est ce dont elle a envie
*****
« Honore le passé en l’oubliant » Rola ELNAGGAR
Université d’Alexandrie, Egypte.
Une journée nuageuse de septembre, entre 1942 et
2019, quelque part en Europe, elle touche le mur où des noms sont gravés. Elle
passe ses doigts sur les lettes rugueuses en grimaçant et elle commence à se
demander si ce mur a été touché par lui,
s’il avait eu sa chance, est-ce qu’il
serait englouti aussi comme elle par ce sentiment ? C’est une drôle d’idée qu’un
si simple artefact ait servi comme une conciliation entre le passé et le
présent. Devant ce mur gris et bleu, elle n’a pu ni rire ni sangloter. C’était
simplement un sentiment inconnu qui divulgue une réalité, une réalité qui l’a
accablée.
Sa vie s’était effondrée d’un coup. Dans ce monde
tracé sur le mur, elle se rappelle qu’elle a perdu un membre de sa famille –
non – deux membres de sa famille. Elle ne les a jamais connus mais le sentiment
de perte existe en elle. Elle ne sait pas si leur mort était un stratagème ou
un coup de dé, le résultat reste inchangé et leurs noms seront toujours sur ce
mur.
Elle a un rêve dont elle ne parle jamais. Jeanne
regarde le mur et elle souhaite que son nom se mette là-haut à côté de ces
inconnus dont sa quasi-inconnue famille fait partie. Ce n’est pas un désir
commun pour les personnes normales, cependant, Jeanne n’est pas normale. Elle
veut partager leur souffrance et une partie clandestine d’elle préfèrerait s’allonger
avec les mains nouées sous sa nuque audessous du niveau de terre, désirant
devenir un emblème de ce génocide. Tout à coup, Jeanne secoue sa tête – refusant cette idée – et avoue qu’elle
est reconnaissante d’être parmi les vivants aujourd’hui.
Quelques secondes passent. Elle fixe
toujours ses yeux sur l'écriture qui l'avait déjà sous sa miséricorde et elle
croit entendre des murmures dans l’espace entre chaque nom gravé. Elle croit
entendre la voix d'un aïeul qui lui adresse la parole en disant : "Jeanne, je suis en train de t'observer
et je suis censé te comprendre maintenant. Tu es fascinée par ce mur et tu as
raison, parce que ce mur n'est pas quelconque, c'est notre souffrance, c'est
notre héritage, c'est notre histoire et notre survie contre l'oubli et les
ravages du temps. Il m'attriste que tu portes ce fardeau. Tu sais quoi, Jeanne
? C'est un mur important mais il reste un mur, un mur conçu pour séparer et
pour nous limiter toujours à cet événement, pourtant, il y a tant de ponts qui
réunissent. Sois toujours à la quête d'un pont et tu ne seras jamais seule.
Jeanne, pour toi, le pont est là, juste devant toi. Honore le passé en
l'oubliant."
C’est peu raisonnable qu’un mur dédié à la mémoire
supplie de ne pas t’attarder aux souvenirs passés.
Jeanne pense qu'elle ne sera jamais capable d'oublier
le passé, il sera toujours enraciné en elle.
Alors, Jeanne quitte cette place encombrante et elle
erre dans le parc sans but précis. Elle ne peut que se comparer à ces petites
filles du mur qui n'ont pas eu l'opportunité d'avoir une enfance normale.
Contrairement à elles, Jeanne a eu une enfance formidable, elle a passé toutes
ses vacances au bord de la mer, entourée de bleu. Pendant ces vacances, elle
portait quelquefois un maillot de couleur rouge, elle a toujours eu peur de
porter une telle couleur qui attire l'attention ; le fait de porter une telle
couleur la fait sentir nue et c'est ironique parce qu'elle se sent également
nue à ce moment-ci. Les larmes, qu'elle réprime, risquent de couler et les yeux
curieux des personnes à la porte d’entrée prouvent qu'elle est maintenant dans
un état très vulnérable et très transparent - similaire à la couleur de l’eau
de ses dernières vacances en famille.
Depuis, cette scène est restée toujours immobile dans
son esprit. Elle peut se souvenir de l'odeur de la petite maison, les chaises
blanches qui étaient en un mauvais état et qui risquaient de se craquer à tout
moment, la chaleur qui était étouffante et le climatiseur qui ne fonctionnait
pas rendant ainsi ses cheveux crépus.
De même, les querelles familiales dès le matin, mais
quand les feux d'artifice avec ses couleurs chatoyantes ont commencé à éclater
dans le ciel – désormais sombre – le
silence a envahi cette maison et les sourires ont effacé les froncements de
sourcils.
Ensuite, et juste après ces vacances, elle était
stupéfaite parce qu'on venait de lui annoncer que son père avait rendu l’âme.
Son dernier désir était de visiter ce mur. Il n’a pas pu le faire, alors, elle
a tenu cette promesse pour son père, malgré
tous les murs métaphoriques qui auraient pu l'entraver.
Elle retourne à l'hôtel, enlève son manteau ainsi que
ses bottes mouillées ; le silence soudain de la chambre est très accueillant et
soulageant. Elle s'assoit près de la petite fenêtre et revoit l'image d'une
petite Jeanne sur les épaules de son père. Dans le parc, il y a des dizaines de
pères avec leurs enfants sur leurs épaules, il
suffit seulement de regarder au dehors.
*****
« Le
rêve d’Anne »
Reta
ELSHAMI
Université de Jordanie,
Jordanie
Le soleil brille sur son visage, la brise fraîche
du soir caresse doucement ses joues. C’était une longue journée éprouvante.
Elle vient d'avoir une discussion avec son amie au sujet de ce qui a causé une
distance émotionnelle entre elles, même si, auparavant, elles avaient ce qui
semblait être une très forte amitié et se sentaient toutes les deux à l'aise
ensemble. Elle sentait que son amie l'avait trahie en l’abandonnant dans une
période si difficile de sa vie, alors qu'elle était tombée dans un état de
dépression.
Sa vie s'était effondrée d'un coup. Elle ne pouvait
pas croire à quel point tout avait radicalement changé en si peu de temps.
C’était comme si elle avait perdu le contrôle et n'était plus capable de
comprendre comment passer à l'étape suivante. Elle avait perdu l'espoir. Elle
était assise sur son lit, les larmes aux yeux, contemplait les changements récents
de sa vie et elle se sentait piégée, angoissée et surtout… toute seule. C’était
à ce moment-là qu’elle avait compris que son plus grand ennemi n’était que ses
propres pensées ravageuses.
La nouvelle était venue quand elle s'y attendait le
moins. Elle n'avait pas obtenu la bourse qui lui aurait permis de voyager à
l'étranger et de poursuivre ses études. Elle était stupéfaite par ce qu’on
venait de lui annoncer. Du coup, elle ne pouvait plus respirer, elle ressentait
le poids des mois précédents sur ses épaules. Elle respirait profondément et
regardait au dehors. Elle s’était dit : « Nage droit devant toi. Bientôt, tu
t'en sortiras. »
Une année a passé. Beaucoup a changé dans sa vie,
mais une chose reste : elle n’a pas cessé de se consacrer pleinement à la
poursuite de ses études. Elle se souvient des moments où sa sœur lui disait ces
paroles : « Mon rayon de soleil… tu es capable de traverser tous les défis de
la vie. Tu es une personne forte et intelligente. Pour toi, Anne, le pont est
toujours là. Garde ta tête haute et reste confiante. Va de l’avant et, un jour,
tu accompliras tes objectifs. » Ces mots encourageants sont la raison pour
laquelle Anne n'abandonne jamais, peu importe la difficulté de la vie. Elle a
toujours le soutien de sa famille, surtout de sa sœur.
Elle était chez elle, seule. Elle regardait par la
fenêtre de sa chambre. Les étoiles commençaient à éclaircir le ciel nocturne.
Son futur remplissait ses pensées. Depuis longtemps, elle faisait l’impossible pour
mériter cette chance, elle travaillait jours et nuits. Quelquefois, elle était
épuisée et sur le point de cesser d’espérer mais elle continuait à lutter pour
son futur. Alors, tout d’un coup, elle reçut un email : « Nous avons le plaisir
de vous informer que votre candidature a été retenue pour notre programme de
bourses ». Elle est tombée à genoux et des larmes de joie ont commencé à couler
sur son visage. A ce moment-là, sa vie semblait parfaite.
Anne a un rêve dont elle ne parle jamais. Chaque
fois qu'on lui demandait de parler de ses rêves et ses aspirations, elle
décrivait toujours la partie qu'elle percevait neutre et impersonnelle aux
autres pour ne pas entendre les jugements des gens. Elle exprimait comment elle
voudrait être une écrivaine à succès, une écrivaine que les gens admireraient.
Cependant, son rêve inclut aussi un détail simple. Au fond, elle aspire à ressentir
un lien profond avec quelqu'un qui la comprend, qui l'accepte avec tous ses
défauts, quelqu’un avec qui elle peut partager une relation sensuelle. La
tendresse et la passion, celles qui lui auraient fait perdre la tête. Elle rêve
de vivre en sérénité, en gaieté.
*****
« Le pont obscur » Tarek BOU OMAR Université Libanaise
Elle aurait dû rester
au Liban, près de ses parents, sortir de l’avion de départ, non pas en
marchant, mais en courant avec toute la force que son corps aurait pu donner – en
se convainquant qu’elle devait survivre dans son quartier, au sein de la
pauvreté. Elle aurait dû succomber à la cruauté du monde, à toute sa futilité, accepter
ce que le destin lui avait attribué. Mais elle avait choisi de défier le sort,
et il fallait en supporter les conséquences.
Elle regarde le
mur. Elle a envie de pleurer, elle n’en est pas sûre. Elle a envie de dormir,
de ne plus se lever. De calmer sa solitude qui crie depuis quinze années.
D’enfouir sa tête sous un coussin, de ne plus respirer. Elle a envie de
disparaître, de fuir son existence amère.
Sa vie s’était effondrée d’un coup, après
avoir quitté ses parents. Elle voulait poursuivre ses études de chimie à
l’étranger, travailler dans un laboratoire et exceller. Honorée par une bourse
après l’obtention de sa licence, elle avait décidé de fuir la crise économique
de son pays, exaucer son rêve et aller à Paris.
Et elle a bien fait cela.
Un jour de
décembre, après la fin du cours, son prof, toujours fasciné par ses
compétences, s’est avancé vers elle :
-
Salut Anastasia, j’ai une
offre pour toi.
-
Pour moi ? Offre de quoi ?
-
Il s’agit d’un travail de
dix heures par semaine.
-
…
-
Il te fera beaucoup
d’argent, et te permettra de soutenir tes parents.
-
Puis-je savoir c’est quel
genre de travail, docteur ?
-
Il faut surtout que personne
n’en sache rien.
-
OK… Mais pouvez-vous être
plus clair s’il vous plaît ?
-
C’est dans la production de
la méthamphétamine.
-
Quoi ?... Non… Non, non,
merci.
-
Tu auras la moitié des
profits.
Elle l’avait toisé du coin de l’œil avant
de rentrer chez elle.
Dans ma chambre, j’ai éteint les
lumières et je me suis allongée sur le sol. J’ai réfléchi beaucoup ce jour-là ;
l’idée s’était salement incrustée dans mon esprit. Mes parents m’avaient élevée
pendant 20 ans, ils avaient sué sang
et eau pour que je sois éduquée, ils étaient prêts à tout sacrifier pour moi,
et là, c’était mon tour de les aider.
La séance suivante,
c’est elle qui s’est approchée de son prof.
Je suis partante pour l’offre. Et
le travail, dès lors, a débuté.
J’ai dit à mes parents que j’avais commencé un job dans un restaurant.
Ils en ont été fiers.
Un samedi
printanier, alors qu’elle faisait la cuisson de la méthamphétamine dans un
appartement loué par son boss, la police a défoncé la porte et dix agents ont
fait irruption avec leur pistolet. La scène la hante encore. Jusque-là, elle se
souvient du masque vert sur son visage, du bécher dans sa main droite, de la
spatule dans sa main gauche, de sa gorge soudainement glacée à la vue de toutes
les armes braquées sur elle. À ce
moment-là, une seule image s’est déclenchée dans ma tête : celle de ma pure
mère, assise dans son fauteuil, en train de tricoter ; près de mon père, dans
toute son innocence, en train de regarder la télé... Je les ai déçus. Je les ai
gravement déçus.
La nouvelle n’a pas
tardé à se répandre. Comme un éclair
affolé, elle a franchi la poitrine de papa et a percé son cœur fragile. À force
de vouloir soutenir mes parents, je suis devenue meurtrière. Maman ne me
parlait plus. Elle ne répondait plus à mes appels. Je suis devenue seule. Elle est devenue
seule.
Il est déjà deux
heures du matin et elle est giflée par l’insomnie. Il y a un silence pesant
ici, et ça pue la sueur. De temps à autre, des murmures émanent des
cellules contiguës, s’atténuent en se frottant contre les particules chaudes de
l’air. Anastasia se retourne dans son lit.
Aujourd’hui, elle a un
rêve. Ôter son costume jaune, sortir, courir sur une plage radieuse – les
bulles d’air s’écrasent contre sa peau, ses pieds s’enfoncent dans le sable, sa
chevelure blonde ondule et oscille et réfléchit les lumières joyeuses du
soleil. Elle a un rêve. Fusionner avec les vagues folles, contempler l’écume
blanche s’insinuer dans ses fentes obscures, ressentir le sel effacer la
tristesse morbide. Mais il fait trop tard pour rêver. Ses lourdes paupières,
d’un seul coup, ont lâché.
Pour toi, le
pont est toujours là. Est-ce que tu le vois ? Vise la lumière au fond, et monte
dessus. Marche lentement et apprécie la brise s’infiltrer dans tes tissus. Il
te reste trois ans dans la prison, mais tu le feras. Tu sortiras, et tu iras
chez ta mère, elle te pardonnera. Enfin tu es sa seule fille, elle n’a personne
d’autre que toi. Concentre-toi sur les réverbères de la fin. Ne lâche pas. Pleure,
crie, sanglote. Mais ne désespère jamais.
« Anastasia ? »
Ouvre les yeux. On t’appelle. Réveille-toi, vite ! Qu’est-ce qu’il y a ? Il est déjà l’aurore. « Tu sors dans quelques
minutes. » Quoi ? Il n’y a pas de
temps à perdre. Lève-toi, et apprêtetoi. Tiens-toi bien. Approche. Entends les
clés s’incruster dans la serrure et les barreaux s’écarter de ton âme. Laisse
la gardienne te guider dans les couloirs. Ressens la joie exploser dans tes
veines. Ôte ton costume jaune. Reçois tes anciens habits et tes affaires. Contemple
la grande porte de sortie s’éclore devant tes yeux. Ressens le soleil embrasser
ton visage fatigué. Sors de ton labyrinthe, et marche avec confiance. Si tu en
as envie, cours. Cours et laisse ta chevelure onduler et osciller et réfléchir
les lumières joyeuses du soleil. Tu ne sais pas comment ça s’est fait, ni celui
qui l’a fait. Personne ne le sait. Mais tu le sauras bientôt. Tout ce qui
compte maintenant, c’est que tu sois libre. Et
que tu le sois à jamais.
*****
« Dominique »
Démiana EL KESS TAKLA
Université d'Alexandrie, Égypte
Elle marche dans une rue le soir. Elle sanglote.
Elle touche le mur. Elle sent que ses
problèmes sont comme un mur abstrait et que le monde est toujours contre
elle.
Sa vie s'était effondrée d'un coup. Toutes ses
amies fidèles l'ont quittée. Elle est seule face à la vie. Elle est accablée de
solitude, elle a un fond de manque. Elle essaie de se rappeler des moments de
joie pour changer un peu l'humeur mais malheureusement tous ces moments se
transforment en regret.
Elle a un rêve dont elle ne parle jamais. Dominique
a besoin d'une amie qui l'aide à traverser ce grand mur en participant avec
elle aux évènements de la vie quotidienne. Elle cherche une personne attentive
à ses paroles et ses histoires. Elle a envie de se sentir acceptée et aimée par
quelqu'un. Chaque nuit, elle sort au balcon et regarde le ciel noir plein
d'étoiles filantes. Mais cette nuit est différente parce qu'elle a découvert
que nous sommes tous des psychopathes. Personne n'est normal. Tout le monde se
ressemble. Elle s’est donc dit : "Il faut s'en aller. Je ne peux pas
demander à une personne limitée de remplir mon esprit avec tout ce dont j'ai
besoin. C'est impossible. Mais qui peux donc occuper ce vide intérieur ?!!
"
Depuis, cette scène est restée immobile. Vers 9h du
soir, le téléphone a sonné. Sa mère a répondu au moment où Dominique était en
train de laver la vaisselle. Elle a entendu sa mère crier : "Oh mon Dieu !
mais il est trop petit pour cela". Le cœur de Dominique a commencé à
battre trop fort : "mais qu'est-ce qu’il s'est passé ? que le Dieu gère
les évènements". Après avoir fini la vaisselle, Dominique se dirige vers
la salle de séjour où se trouve sa mère. En voyant le visage de sa mère, elle a
compris le mur rigide. Elle était choquée. Ses paupières ne sont pas fermées
toute cette nuit. Les funérailles étaient pleines de personnes ; elle n’a pas
pu rentrer dans l'église. Ce jour était très triste. Pendant la prière, tous
les beaux moments qu'elle avait vécus avec lui se poursuivaient dans sa mémoire
comme un film. Il était aimé par tout le monde. Il était un ange entre nous sur
terre. Il a fini son examen trop tôt et il est vite parti. Cela fait cinq ans
déjà et ce souvenir est toujours présent.
Comme chaque nuit, sortant au balcon pour contempler
les étoiles brillantes, Dominique se rappelle sa vie passée. Elle entend une
voix venant du ciel qui dit :"Pour toi Dominique, le pont est toujours
là". Elle répond :"Mais qui êtes-vous ? "
-"Moi, c'est le pont qui peut occuper ton vide
intérieur. Je suis le chemin, la vérité et la vie. Je peux casser ton mur par
un mot, je peux transformer ta vie en une vie éternelle et joyeuse. Ne crains
rien, je vais essuyer tes larmes."
Elle était stupéfaite par ce qu'on venait de lui
annoncer. Comme finalement elle a trouvé le pont. Quelqu'un a répondu à sa
question répétée. Dominique a été ravie, elle a trouvé l'ami éternel qui sera
son compagnon pour toujours. Elle ne demandera jamais un échange de sentiments
parce qu'elle a trouvé le véritable amour qui va la satisfaire.
*****
«
Une école contre les murs »
Nada
Ayman ABDEL WAHAB
Université d'Alexandrie, Egypte
Elle touche le mur qui la sépare de son pays.
Chaque fois qu'elle se tourne vers ce mur, elle se souvient de son enfance
innocente sous les cieux de son pays, le ciel ouvert, bleu et calme. Elle se
souvient des chuchotements de sa mère et des histoires que son grand-père lui
racontait. Elle se souvient des jardins sans larmes tristes. Elle se souvient
de son premier amour. Elle n'oublie non plus que son pays était occupé et ses
richesses pillées. Elle ne devrait pas oublier le mur de séparation. Sa vie
s'était effondrée d'un coup après avoir appris la mort de son fils, un brave
soldat, tué en défendant son cher pays. Son fils était la seule personne à la
soutenir dans ses moments de tristesse et de douleur. Avec lui, elle partageait
des moments de joie. Elle sent que l'occupation lui a volé ce qu’elle a de plus
cher. La mère se tient debout sur la tombe de son garçon et pose les roses
qu'elle aurait souhaité lui offrir le jour de son mariage, mais il a épousé sa
petite amie, Palestine.
Après la mort de son fils, Nadia a décidé de
retourner dans sa ville natale. Elle y est arrivée plusieurs années après son
mariage, serrant sa clé en une chaîne autour de son cou. Elle se souvient
encore de la maison dans laquelle elle a passé les plus beaux moments de son
enfance, les rayons du soleil emplissaient les lieux et les fleurs s'épanouissaient.
Mais son cœur s'est brisé quand elle a regardé autour d'elle. Il n'y a plus de
fleurs, la lumière du soleil a disparu, et la maison est devenue ancienne et
usée. Mais elle a recommencé à faire revivre sa maison.
Elle a un rêve dont elle ne parle jamais. Nadia
rêve de devenir enseignante parce qu'elle comprend que la science, c’est la
lumière, elle sait qu'avec le savoir et le travail, elle libérera son pays des chaînes
du colonialisme. Après avoir perdu des êtres très chers à son cœur, il ne lui
reste plus rien. Elle décide de réaliser son rêve et d'ouvrir une petite école
pour les enfants du village. On vient de lui annoncer que le gouvernement a
alloué une somme d’argent pour agrandir l'école qui n’était qu’une pièce de sa
maison avec une table ronde et quelques chaises.
Un bâtiment de trois étages sera construit. Cela
augmentera le nombre des classes pour accueillir des élèves supplémentaires en
plus d'une cour et d'un laboratoire. Le plus important, c’est de créer une classe
pour les personnes handicapées. Ce qui rend cette vieille dame heureuse, c'est
l'intérêt de son pays pour l'éducation malgré les sévères restrictions.
Les années passent, et après dix-huit ans, Nadia
assiste à la remise des diplômes de la première classe. Et voici Nadia assise
dans son bureau, regardant dehors par la fenêtre les préparations de la
fête.
Un message pour Nadia : Pour toi, Nadia le pont est
toujours là. C'est avec ta nièce, cette fille de dix ans que tu as adoptée au
décès de sa mère. N'aie pas peur de ce pont. Pont de différence entre les
générations. Pont de différence des idées Je sais que tu en as peur.
Effrayée par le temps, tu crains de la laisser
seule dans ce monde. Mais n'aie pas peur car Dieu ne la laissera jamais.
*****
«
La maison détruite »
Sara MOHAMED AHMED
Université
d’Alexandrie, Egypte
Elle touche le mur de la maison d’enfance où elle a
vécu 25 ans. Maintenant la maison est complètement détruite. Elle se rappelle
ses souvenirs d’enfance, ses rires aux éclats, ses larmes et aussi sa famille
morte au-dessous de sa maison.
Elle a essayé plusieurs fois d’oublier le passé mais
malheureusement elle ne peut jamais oublier. Elle pense que tous ses souvenirs
sont des murs qu'elle ne pourra jamais casser. C'est pour cela que les
histoires ne meurent jamais.
Sa vie s'était effondrée d'un coup à son 25ème
anniversaire. Il y avait une guerre entre son pays et un autre pays voisin.
Elle était chez sa tante quand une bombe a été jetée sur sa maison d'enfance.
Toute sa famille est décédée.
Elle a un rêve dont elle ne parle jamais, elle
aimerait voir sa famille encore une fois. Elle espère toujours que tout ce qui
s'est passé n'est qu'un cauchemar et qu'elle puisse se réveiller le plus vite
possible.
*****
«
Le jardin secret de fleur »
Mariam FATHY
Université
d’Alexandrie, Égypte.
Elle touche le mur de sa chambre, assise sur sa
chaise en bois, entourée de mutisme, il n’y a que le son des pendules qui
interrompt ce silence. Elle observe sa pièce préférée. Pour elle, ce n’est pas
une simple chambre. On pourrait dire que cette pièce est son lieu de refuge,
son chez elle où l’adolescente se sent à l’aise, où personne ne la juge. La
jeune fille de 19 ans retient la notion de la liberté juste dans son monde
abstrait où les couleurs dansent avec la musique.
L’hiver dernier, tout a été bouleversé. Entre
trahison, amour nonpartagé et échecs, elle se retrouve bloquée dans sa
solitude, mieux vaut dire devant son mur. La jeune fille a pris le temps pour
grandir et pour accepter ses larmes et ses terreurs. L’acceptation n’est pas toujours
facile mais, elle est évidente.
Elle a un rêve dont elle ne parle jamais, son
mutisme l’empêche. Fleur est assise devant son mur sur lequel il y a un tout
petit miroir. Elle se regarde, le visage pâle, le regard vide et se demande qui
elle est. Et où est son vrai chez elle ? Elle décide de porter son courage à
deux mains et de mener sa propre enquête. La chanson « qui je suis » lui vient
à la tête « je me sens seule. Parfois je garde tout pour moi. Ça me blesse
souvent, on raconte des histoires, on parle sans savoir. Mais personne ne
m’entend. »
Il y a 15 ans, elle est devant le même mur qu’elle
perce avec son regard dans sa chambre, elle est entourée par les yeux inquiets
de sa famille, le silence absolu de son oncle et les larmes coincées dans les
paupières de son grand-père. Elle se cache derrière le lit en bois très ancien,
Fleur ne comprend rien à ce qui se passe chez elle, la petite fleur voit sa
grand-mère endormie sur le lit. Le lit de fleur.
Était-elle vraiment endormie ? En tout cas, c'était
ce que sa famille lui a dit. Quelques minutes après, le soleil qui envahissait
la chambre s'est couché. La mère a éloigné la petite enfant de cette scène.
Elle ne comprend rien, la nuit est tombée. Des tas de personnes arrivent en
sanglotant. La famille ne pleure pas mais ne sourit pas non plus.
Sa mère lui a dit : « mamie a fait un voyage au
ciel. » Fleur toute naïve s'est posé la question : « mais comment ? Elle n'a
même pas pris l'avion.» Avec un petit sourire triste au coin des lèvres et une
larme qui coule sur ses joues, Fleur revient à son présent et elle décide de
reprendre son chemin.
Toute sa vie était un mirage. Ce jour l’a
chamboulée quand elle a rencontré Enzo un jeune homme qui a pris ses ailes pour
s'envoler très jeune. Il lui a dit qu’elle était son âme sœur. Venait-il pour
détruire sa vie ou pour la reconstruire ? Fleur n'a plus rien à perdre. Le
soleil s'est endormi dans la maison elle était l'unique enfant de sa famille. À
ce moment précis, elle est la seule personne qui reste encore de cette famille.
Une bagarre se déroule chaque minute dans sa tête et la pousse maintenant à
aller chercher son vrai refuge.
Peut-être, cette maison n'est pas la bonne. Elle
doit révéler ce secret qu'on lui a toujours caché. Fleur a passé un coup de fil
à Enzo, son âme sœur, sa moitié et lui a dit qu'elle va aller au bout du monde
pour trouver leurs parents génétiques.
Sa vie était un mirage, un mensonge. Pendant 19
ans, elle a cru qu'elle était la fille unique de sa famille, certes elle est la
fille unique mais non pas la fille génétique, elle est adoptée et ne connaît de
sa propre famille qu’Enzo, son jumeau.
Fleur regarde à travers la fenêtre, et voit une
lumière. Elle observe un rayon de soleil qui s'échappe pour arriver à sa
chambre pour la réconforter.
C'est bon, c'est décidé elle partira loin, très loin
!
Fixant le mur, elle se rappelle les ponts qu'elle
dessinait petite. Fleur aimait tant la grandeur, les murailles et les palais.
Elle en dessinait beaucoup sur le mur, tout le monde la grondait sauf la mamie.
Après sa disparition la chambre est redevenue blanche de nouveau, pas de
couleurs, pas de joie. Pour Fleur le mur blanc est une toile sur laquelle elle
est censée dessiner mais tout le monde l'a souvent empêchée de le faire.
Pour toi Fleur, le pont est toujours là, ce pont
est resté dans un coin dans ta tête. Les châteaux et les murailles sont
toujours dans ta mémoire. Il faut absolument que tu marches petit à petit sur
ce pont pour enfin arriver à ton château. C'est vrai, la nuit est tombée mais
le soleil se lèvera un jour. Toi l’adepte de l'espoir, aie du courage ma fille et
va à la recherche de ton sang. Plus rien ne t'arrêtera.
Cette musique lui revient encore à la tête : «je veux
montrer mon univers, qui je suis vraiment. Je suis moi-même, j’aimerais que
l’on m’aime, pouvoir faire confiance. Quoique je dise ou fasse, je ne trouve pas
ma place. Mais je rêve en silence. »
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« Le mur du ciel ouvert » Nour
Eldine MOSTAFA HAGUAR
Université
d'Alexandrie, Egypte.
Il était une fois en Egypte une fille qui s'appelait
Nour. Elle avait dix ans, les yeux noirs, les cheveux bruns et le teint clair.
Cette fille était très belle, raisonnable et sage. Elle n'avait ni sœur ni
frère. Elle rassemblait plus à son père qu’à sa mère. Elle aimait lire comme
lui, et dessiner.
Mais un jour, le père de Nour est tombé durant son
travail et ses amis l'ont transporté à l'hôpital. La mère de Nour s’est rendue
à l’hôpital.
Elle interrogea le médecin :
-Comment va mon mari ?
Le docteur baissa la tête et répondit :
-Je ne sais pas quoi dire madame mais votre mari est
très malade. Il est atteint du cancer mais dans un stade très avancé et on doit
commencer le traitement le plus tôt possible.
-On peut l’emmener dans n'importe quel pays si c'est
mieux pour le traitement
-Non on peut faire tout ça ici.
Nour était jeune mais elle comprit les paroles du
docteur. Elle avait peur de perdre son père. Arrivée à la maison, elle pleura
beaucoup et pria pour que son père guérisse.
Les années passèrent et l'état du père de Nour
s'aggrava. L’année de son bac, le père
devint très malade. Il fut transporté de nouveau à l'hôpital et mourut. Ce fut
un choc pour Nour. Elle ne savait plus étudier ni continuer sa vie. Elle
pleurait tout le temps, son cœur battait fort de douleur, son visage était
pâle, elle devint maigre. Elle s'éloigna de tout le monde, elle n'allait plus à
l'école, ne parlait à personne et restait toute la journée dans sa chambre. Un
jour, elle s'est évanouie de faiblesse et sa mère l'a transportée à l'hôpital.
Là, le docteur l'a beaucoup conseillée. Ses amies ont décidé de l'aider.
Elles lui ont apporté les leçons qui lui manquaient
et sont restées auprès d’elle. Le jour de son premier anniversaire après la
mort de son père, elles apportèrent une grande tarte et beaucoup de
cadeaux.
Nour aimait beaucoup son père. Elle faisait avec lui
beaucoup d’activités et ils plantèrent ensemble des fleurs dans le jardin. Elle
sent toujours qu'il se trouve avec elle n'importe où elle va, qu'il la voit et
qu'il est fière d'elle. Et pour qu'il ne sente pas qu'elle l'a abandonnée, elle
lui parle chaque jour avant de dormir, elle lui demande son avis et se rappelle
son anniversaire. Nour va visiter son père presque chaque jour. La mort ne
pouvait pas les séparer. Elle lui dit toujours leur phrase commune : pour toi
le pont est toujours là.
Nour commence à être optimiste. Les examens ont
commencé et elle a décidé de se concentrer sur ses études, d'obtenir un grand
pourcentage au bac pour être médecin comme son père le voulait, pour qu'il soit
fière d'elle.
Elle obtint de bons résultats. Son rêve allait se
réaliser. La première chose qu'elle a faite était d’aller chez son père pour
lui annoncer cette bonne nouvelle avec un grand bouquet de fleurs.
Elle était la première pendant toutes les années
d'études et elle commença son travail. Parmi ses malades se trouvait un soldat.
Ils se sont aimés, ils se sont mariés et ils ont eu deux enfants. Elle avait
toujours peur pour son mari, qu'il meure pendant son travail mais elle ne le
disait jamais. Elle voulait être optimiste avec lui.
Elle touche aujourd’hui le mur du ciel ouvert avec
la joie.
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« L’aube
de la liberté »
Khawla
ALJABERY
Université de Jordanie, Jordanie
Elle approche l’oreille, un instant et elle peut
entendre ce qu'il y a derrière le mur et imaginer la liberté et le ciel ouvert
si bleu, si calme, elle sourit malgré son vieux chagrin.
Sa vie s'était effondrée d'un coup, jamais elle n’avait
imaginé être dans une situation aussi cruelle. « Quelle connerie la guerre »,
elle a pensé en s'éloignant du mur.
Elle a un rêve dont elle ne parle jamais. Laila
n'était pas comme les autres jeunes filles de son âge, elle ne voulait pas
beaucoup de bijoux et de beaux vêtements mais un pays sans guerre où elle
pourrait vivre calme et contente. Elle a pris le temps pour le souhaiter tous
les jours, toutes les nuits, tout au long de sa vie.
C'était une nuit d'été calme et douce devant la mer
éclairée par la lune, et sur la plage tout le monde était heureux surtout les
enfants qui mirent dans l'air plein de joie. Ils jouaient avec le sable en
faisant des châteaux, ils criaient, ils couraient partout derrière les chiens.
Depuis, cette scène est restée immobile dans sa mémoire.
Le pont est toujours là, où les gens des temps
passés ont laissé des souvenirs dans les mémoires vivantes, des gouttelettes
d'eau.
Elle regarde au dehors… à l'aube de la
liberté.
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«
La vie d'Eve »
Assala
AWAD
Université de Birzeit, Palestine
Elle traînait avec ses amis, à la fin des cours.
Elle n'avait aucune idée que ce serait le dernier jour avec ses proches, le
dernier jour de la liberté. Quand elle s'est couchée cette nuit-là, elle ne
savait pas qu'elle en serait tirée avec force, puis elle aurait les yeux
attachés et traînés par une force indésirable vers une destination inconnue.
Elle touche le mur de la cellule de prison. Elle ne
sait pas ce que l’avenir lui réserve. Elle lit les noms des anciens prisonniers
gravés sur les murs.
Eve se souvient encore de ce jour qui a changé sa
vie et l'a amenée à repenser sa morale et ses objectifs dans la vie. C'était
une nuit froide et brumeuse, elle rentrait du journal après une journée
fatigante. Normalement à cette heure, son quartier est calme, car tout le monde
dîne après une longue journée. Cependant, cette nuit-là, cette tranquillité a
été coupée par le son des pleurs, d'abord, elle n'y pensait pas. Mais plus elle
était proche d'arriver chez elle, plus les bruits devenaient forts. Son cœur se
serra dans sa poitrine.
En arrivant à sa porte, elle a vu qu'elle était
largement ouverte. Sa voisine s'est précipitée pour la serrer dans ses bras
avec des yeux larmoyants, elle n'a pas eu à lui demander ce qui se passe, car
dès que sa voisine s'est éloignée, débloquant le scène, elle a vu un petit
corps couvert de couvertures blanches couché au milieu du salon, entouré de sa
mère en pleurs et du reste de sa famille. Son petit frère précieux ne lui
sourira plus tous les matins.
Même après tout ce temps, elle ne l'avait pas
oublié. Ses amis essayaient de la soutenir, de lui faire oublier et passer à
autre chose. Une de ses meilleures amies à l'époque, Sara, a essayé de lui
expliquer qu'elle n'était pas la seule personne à avoir perdu quelqu'un qu'elle
aimait. Mais Eve ne pouvait pas écouter, elle n'arrêtait pas de penser aux
"et si", et s'il n'était pas parti de la maison ce matin-là, et s'il
n'était pas allé chez ses amis, Dieu, et s'ils vivaient dans une autre région,
il serait peut-être encore là. La voix de son amie la tira de ses pensées : «
Eve, il y a un pont entre ton triste passé et ton avenir plein d'espoir, pour
toi le pont est là ». « Mais que se passe-t-il si j'ai peur de le traverser »
pensa Ève en elle-même. Elle voulait se venger
On venait de lui annoncer qu’elle serait libérée
demain. Après tous ces mois de souffrance et d'agonie, elle reverra enfin la
lumière du soleil, elle pourra marcher plus d'un kilomètre, boire et manger ce
qu'elle désire. Cependant, dans la camionnette que son père avait louée pour la
ramener à la maison, elle ne pouvait pas cacher ce sentiment, elle sentait qu’elle
n'était pas complètement heureuse. Elle se sentait vide, oui, elle est sortie
de cet enfer, mais il y en avait encore d'autres à l'intérieur. Son père coupa
sa pensée, comme s'il avait senti son malaise, faisant signe au ciel bleu clair
à l'extérieur de la fenêtre, "chérie, regarde au dehors".
Eve a un rêve dont elle ne parle jamais, elle rêve
d'échapper à cette folie qu'est sa vie, elle veut courir et ne jamais regarder
en arrière, toute cette tristesse et ce désespoir, cette vie compliquée qu'elle
n'a jamais demandée, toute cette énergie négative la fatigue. Elle voudrait
obtenir un billet d'avion, aller dans un endroit isolé et vivre une vie où elle
n'a pas à se battre tous les jours pour subvenir à ses besoins humains simples.
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« La
maison d’enfance »
Rita
RAAFAT
Université d'Alexandrie, Égypte
Tiana touche le mur de sa maison d'enfance. Elle s’en
était éloignée depuis quelques années. Pourtant les histoires de cette demeure
sont toujours vivantes en elle. La jeune fille est triste parce qu'elle avait
dû quitter ce logement où elle a beaucoup de souvenirs. Elle pense à sa famille
qui s'est séparée. Elle était attachée à sa maison.
Elle cherche la grande joie dans chaque relation.
La fille sent toujours qu'il y a un sentiment qui manque.
La petite rêveuse souhaiterait retrouver sa famille
dans sa maison d'enfance dans un esprit plein de joie et d'amour. Elle repense
à son frère, au jour de son départ. Tiana n'oubliera jamais ce jour-là. Elle se
rappelle tous les détails, les actions qui se sont passées et les sentiments
qu'elle a ressentis.
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“Amour
maternel”
Hania AHMED IBRAHIM FAHMY ZEKRY
Université
d’Alexandrie, Égypte
Elle touche le mur, elle tâtonne. Par où commencer
? À chaque fois, elle hésite. Raconter ses souvenirs d’enfance, c’est un sujet
qu’elle essaye toujours de fuir. Elle était une enfant triste qui ne savait
plus le rire. L’enfermement dans sa chambre, son dernier refuge, la plongeait
de plus en plus dans son chagrin.
Ses larmes baignent ses yeux de nouveau.
Elle tremblote et vacille. Des images et des fragments de souvenirs lui hantent
l’esprit. Au lieu de penser à son avenir comme tout petit enfant, la pauvre
craignait le lendemain. Les moments de joie étaient courts. Le manque d’amour maternel
brisait son cœur et, même à vingt-cinq ans, elle ne peut pas oublier l’abandon
de sa mère.
Elle a un rêve dont elle ne parle jamais. Déchirée
entre deux pays, la France et l’Allemagne, entre deux parents divorcés et entre
deux religions, Aurore voulait toujours rejoindre sa mère. Rien n’a réussi à la
remplacer. Elle a passé beaucoup de nuits blanches pensant à ce rêve qui
pourrait mettre fin à cette séparation douloureuse. Le manque de tendresse
semble ici monstrueux. Jusqu’à maintenant, elle est bloquée et n’arrive pas à
comprendre ce rejet auquel elle n’avait pas été préparée.
C’était une nuit froide. On entendait le
bruit de la foule à la gare de Paris, la petite était parfois poussée par des
inconnus. L’arrivée et le départ des trains se succédaient dans un cycle
infini. Naïve, elle pensait au début que c’était une nouvelle aventure.
Cependant, il s’agissait du début de la fin… Toutes les deux se sont dirigées
dans un café : la mère a pris un café noir au goût amer comme son cœur de pierre
et Aurore a commandé une tartine avec un jus d’orange. Insoucieuse à la fois
des sentiments de sa petite fille et de son futur,
Hélène a préféré poursuivre la lecture de son roman
au lieu de parler avec sa fille pour la dernière fois. En fait, elle n’était
pas préparée à avoir un enfant à cet âge-là. Elle voulait donc quitter la
France pour l’Allemagne avec son nouveau petit ami. À vingt-et-une heures pile,
son ex-mari est arrivé pour prendre Aurore qui ne comprenait pas ce qui était
en train de se passer. Plus tard, Hélène a disparu et sa fille n’a plus eu de nouvelles.
Le père s’approche de sa fille. Il la regarde dans
les yeux en lui disant : « Je sais que tu n’as rien fait pour tant souffrir.
Mais, pourquoi ne pas réessayer de renouer les liens avec ta mère ? » À chaque
fois qu’on parle de sa mère, elle tremble et préfère le silence. Quelques
minutes plus tard, son père reprend : « Hélène m’a envoyé plusieurs lettres disant
son regret de t’avoir laissée. Elle m’a dit également qu’elle t’avait appelée
plusieurs fois mais n’avait reçu aucune réponse. Regarde ma fille, elle veut
que tu lui pardonnes. » Aurore est stupéfaite et se met à sangloter. Peut-elle
enfin retrouver l’amour de sa mère qu’elle a tant cherché ? Rêve-t-elle ? Qui
ne peut pas pardonner à sa mère, cet être parfait et angélique ? Après avoir
beaucoup réfléchi, Aurore exprime à son père son désir de partir revoir sa
mère. Il est temps maintenant que la blessure arrête de saigner. Elle a tellement
soif de l’affection et de la sécurité maternelles. Finalement, elle va être
guérie de cette maladie qui semblait incurable.
Mais elle reçut un appel de son beau-père
avec qui elle n’avait jamais parler. Elle a été paralysée par ce qu’elle venait
d’entendre. Sa mère avait fait un accident et son cas est très grave. Sa quête
de bonheur n’arriverait-elle pas à ses fins ? Aurore s’est laissé tomber sur le
canapé, ses forces lui échappent. Il y a qu’une semaine elle pensait qu’elle
rencontrerait sa mère et aujourd’hui, elle risque de la perdre à jamais. Son
père la prend dans ses bras, essaye d’essuyer ses larmes et l’apaiser. « Nous
devons nous rendre en Allemagne le plus tôt possible ». Aux premières lueurs de
l’aube, Aurore regarde au dehors, elle contemple le ciel demandant que Dieu
guérisse sa mère.
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« Le poème » Tamara HAYEK,
Université Libanaise, Liban
Elle
regarde le mur l’air désespéré.
Un intense
chagrin détruit son cœur.
Voilà ce
monde qui se dessine par la mélancolie ; le mur, tout vide, tout comme elle.
Aucune émotion. Elle répète : nos rires et nos souvenirs, je ne suis plus
vivante. L’amour perdu dans ce jardin et ne reste qu’une âme vide sans espoir.
Elle
regardait ses pensées comme des images plates. Les souvenirs lui hantaient
l’esprit. En un an, une amitié était née entre eux, puis une histoire d’amour.
C’était si détruisant comme un poison circulant dans les veines. Elle ne
craignait pas l’avenir. C’était lui qu’elle voulait. Mais plus maintenant. Même
les grandes joies vous laissent un peu de regret.
Isabelle
aimait les matins de juin à côté de son mari, elle le regardait intensément, le
prenait dans son regard et lui disait : “c’est un pays de fou, prenons la fuite
! ”
Il ne
voulait aller nul part. Mais il est parti sans elle. Elle prend un papier et
écrit : 12 juin 1820, poète, Isabelle. Elle commence à écrire son poème sans
crainte de la société. Elle libère son esprit de tout ce qui l’a tourmenté.
Devant elle il n’y avait qu’un mur avec l’histoire de cette femme anonyme poète
secrète en 1820. Elle écrivait sans se
lasser, elle se défoulait, la plume écrivait les paroles de son âme.
C’est à ce
moment-là qu’elle s’est sentie tellement puissante. Le pouvoir et
l’intelligence de cette femme a changé le monde. Les paroles de son âme et les
visions, le monde est devenu paradisiaque. Une larme, une autre, ses doigts
tremblaient. Son cœur était tellement brisé. La plume ne cessait d’agir avec la
musicalité de son âme, les rimes de son esprit et les paroles de son cœur.
« Tu m’as
ruinée en devenant celui qui m’inspire pour l’écriture poétique”. Elle s’est
adressée à lui.
Malgré
la souffrance et la déchirure, ce poème est encore à propos de lui. En 1820,
elle n’avait pas le droit de pleurer pour hurler sa souffrance.
Après
une décennie, une nouvelle arrive. On frappe à la porte mais il n’y a personne,
sauf une enveloppe étalée au sol. Isabelle la prend et l’ouvre, c’est une
lettre de l’Académie française. Son puissant poème a touché le public, les
femmes délaissées, les auteurs et les écrivains les plus célèbres du XIXème
siècle.
Elle regarde
dehors tout en murmurant : « je suis une femme, je suis Isabelle, tu as détruit
mon cœur et j’ai changé le monde avec les paroles de l’âme que tu as brisée. »
*****
« Ses rêves, des images plates » Samar SAWAAN Université Libanaise,
Liban
Elle
regarde ses rêves comme des images plates.
Laura, jeune
fille rêveuse, a perdu tout ce qu'elle avait à cause de la guerre. Elle a été
forcée de quitter sa maison et son pays.
Ce
jour-là, elle était assise, le visage mouillé de larmes, à côté de son père,
puis elle a entendu une voix disant "je suis désolé !" ; elle a su
alors que sa sœur était décédée.
Elle a
regardé dehors, elle a regardé le ciel, pourquoi Dieu.
Laura
rêve toujours qu'elle est dans un endroit comme un terrain vague. Il y a là une
petite fille. Laura s'approche de la petite fille, la prend dans ses bras et
fond en larmes. Elle voudrait reprendre sa sœur dans ses bras.
Mais la
vie est devenue pâle pour Laura, une vie sombre, sans couleur, elle vit dans sa
coquille pleine de solitude et de douleur.
Aujourd'hui,
Laura regarde le mur de sa chambre. Elle le voit comme une toile, elle dessine
le jardin où elle a vécu son enfance dans son pays avec sa petite sœur avant la
guerre.
Mais il
faut toujours savoir que pour toi Laura, le pont est toujours là. La douleur,
les peines et les souvenirs malheureux ne sont que les matériaux à partir
lesquels vous construirez le pont pour un meilleur avenir.
*****
« Faire
de l’obstacle une solution de survie ? »
Joy KHALLOUF, Université Saint-Esprit de Kaslik, Liban
« A
mon personnage,
Pour toi, le pont est toujours là. Le voyage
t’attend et t’attendra à jamais. Les aller-retours que tu souhaites, les
moments de doute et d’hésitation, ne seront plus un obstacle. Tu es mon fils
prodigue et je suis le dieu qui t’attend les bras ouverts. J’ai construit ce
pont avec amour, en pensant à toi. Et ce qui se fait par amour ne se brise pour
rien au monde. Je ne t’appellerai jamais car tu n’as pas de nom, mais je
répandrai mon aura jusqu’à toi, tu verras mon auréole de très loin qui t’invite
à entreprendre ce voyage, sur le pont, que j’ai bâti, par amour, pour toi. »
Sa vie s’était effondrée d’un
coup, laissant beaucoup de résidus. Ces restes, elle en a tiré profit. Elle a
utilisé les miettes restantes de sa vie pulvérisée pour en faire une force, une
barrière de protection. Elle a créé un mur plus solide que sa vie, et a appris
à laisser tomber ce qui s’en va. En le faisant tomber, elle reprend uniquement
les résidus pour redonner force à son mur. Elle regarde ce tas de pierres construit
pour l’enfermer. Elle contemple cette limite : ce mur n’est qu’une porte fermée
parmi tant d’autres. Le monde extérieur lui est inaccessible, ce qui veut dire
une invitation vers la porte de son esprit :
une introspection qui, elle, ne peut être une
prison.
Elle
tremble. Tout se noircit.
Des
images circulent, en couleur et sans.
Sélection.
« L’image est gravée, figée dans mon esprit, qui
lui, baigne dans l’agitation. Là où ce souvenir demeure inerte, mon âme, elle,
mène une guerre contre le pourquoi, le comment, le où sont-ils aujourd’hui. Je contemple
ce moment, le supplie de respirer, de reprendre vie. Je veux le secouer mais
quand je tends la main, il disparait sous son sombre, car rien en cette scène
ne m’est accessible, rien en se souvenir ne m’appartient. L’ironie du sort,
tout avoir sans que rien ne m’appartienne », avoue-t-elle, tête au mur.
Elle a un rêve qui ne peut être
évoqué devant quiconque. Le monde juge, tranche, ne comprend pas. Son rêve ne
peut être partagé. Elle veut juste se dénuder, se rafraîchir et enlever tout ce
qui l’habille, tout ce qui lui permet d’être qualifiée. Elle veut juste ne pas
avoir de nom. C’est un fardeau, une génération, une race, un âge. C’est ce qui
lui rappelle son existence dans un monde où elle ne réclame que le déni.
Élimination
du mur.
Quoi ? Pourquoi ? Surtout pas. Ce tas de
pierre qui l’emprisonne, elle en a fait son monde. Elle s’est arraché toutes
les étiquettes qui l’étouffent, toutes les appellations qu’on lui avait
données. Ici, c’est chez elle. En se détachant de l’extérieur, en se dénudant
de toute pudeur, elle a commencé son aventure. Passant du conscient vers l’inconscient,
du cœur vers le cerveau. Elle a chanté avec le son du sang parcourant ses
veines. Derrière ce mur, elle se découvre. Plus elle creuse au fond d’elle-même,
plus elle réalise la profondeur de son âme. Est-ce un don humain, faire de
l’obstacle une solution, pour survivre ?
*****
« Le mur de la guerre »
Mohamad DIRANY
Université Libanaise, Liban
Elle regarde le mur de la guerre
La petite attend le retour de sa famille morte
Elle crie « où est mon père ? »
Elle imagine que, dans le mur, s'ouvre une
porte.
Elle, l'amie de l'enfermement
Elle s'habitue
Elle est l'ennemi de l'éloignement Le cœur battu.
Cette pauvre fille dessine la mer
Dessine le navire
Elle se souvient de la guerre L'homme n'oublie jamais le pire.
Elle a perdu tout, elle compte les mouches sur
ses cheveux, les balles par terre. Elle compte chaque minute, chaque heure
d'espoir attendues.
Elle crée une mère qui l'embrasse et elle écoute une
expiration sortie du cadavre de son père.
Elle se réveille de ses rêves en contemplant le
cauchemar authentique dans lequel la vie lui dit « Eh ! enfin avec ton
optimisme, n'attends personne, tu es mon orpheline ».
Elle rêve à sa petite maison écartée au village, et
se souvient du goût de croissant que sa mère préparait. Elle se rappelle son
nom prononcé par son père, "Juliette".
Mais aujourd'hui elle a perdu sa famille, sa maison,
sa chambre et même son nom.
Elle se présente à nouveau : je m'appelle J...Jul..
Je ne m'en souviens plus. Je m'appelle l'orpheline de la vie, l'optimiste, les
ruines de la guerre. Je suis un ensemble des larmes, une victime qui attend
quelqu'un qui l’enterrerait.
*
J'ai découvert le facteur : il porte des vêtements
bleus, un képi sur sa tête et un sac dans lequel des messages attendent les
destinataires.
Il me donne une enveloppe et il part avec impatience.
À ce moment-là, je regarde ses pas qui s'éloignent. Je contemple l'enveloppe
qui cache un secret, un indice d'espoir, ou de désespoir, mais ce qui est
certain c'est que je suis seule devant une surprise. Je me rappelle que je n'ai
pas lu le nom de destinataire.
J'ai senti que le facteur ne veut que se débarrasser
des messages à cause de la fatigue. Il ne m'a pas demandé mon nom.
J'ouvre l'enveloppe. Je commence à lire le message «
à ma fille que j'adore…
Malgré l'éloignement qui est la conséquence normale
de la guerre, je t'informe que je suis encore vivante et j'attends le moment
durant lequel je t'embrasserai…
Envoie-moi un message qui m'aide à retrouver ton
adresse.
À bientôt Rima, je t'aime ma fille
Ta mère qui t'adore »
Rima ! Mais je suis Juliette… Mon nom est-il Juliette
ou Rima ? Mais je suis sûre que je m'appelle Juliette.
J'ai fermé l'enveloppe en tremblant pour découvrir
que le message est envoyé d'une mère tendre à sa fille perdue pendant la
guerre. "Rima". À ce moment-là, j'ai détesté le facteur, les messages
et j'ai honte de ma mère.
*
Pour toi Juliette, la vie est une punition, une
malédiction peut-être. Sois optimiste, le pont entre le présent et le futur
florissant est toujours là.
Je sais que les conseils pour oublier les mauvais
souvenirs n'aboutiront à rien, parce que l'homme qui perd son passé est la
victime de son présent.
Juliette, je ne peux plus parler car ta situation est
vraiment malheureuse.
Je voudrais écrire une phrase, une seule phrase par
mes larmes avant l'encre de mon crayon, je voudrais noter une demande, non pas
un conseil en vain : « cherche dans le ciel noir de la vie une étoile qui
brille comme ton sourire, non pas comme tes larmes ».
Elle était stupéfaite par ce que je venais de lui
annoncer. Elle a accepté ma demande en prenant la décision de modifier le mode
de sa vie et en essayant de trouver l'étoile qui allume son futur. J'ai avoué
le secret qui m'étouffe : c'est que les étoiles que Juliette cherche sont
brisées, sont tombées à cause d'une guerre entre les étoiles.
La guerre est partout même au ciel…
J'ai avoué le secret mortel, je serai la personne qui
a trompé Juliette, et le méchant que la pauvre fille attendait pour la faire
enterrer.
Après sa mort, ou plutôt après que je l'ai tuée, je
ne fais rien dans ma vie que regarder en dehors, en me souvenant des mouches
sur ses cheveux, ses mains qui tiennent l'enveloppe et de ses dessins sur le
mur.
*****
« Les murs sont beaux quand
ils racontent des histoires » Malak EZEDDIN
Université Al Zaytouna, Jordanie
Elle
regarde le mur qui lui rappelle son enfance quand ses grandsparents étaient
avec elle. Elle se rappelle encore le mur de son école qui lui apporte le
souvenir des beaux visages de ses amis, de ses voisins, quand ils étaient
petits et vivaient sans restriction.
Sa vie
s'était effondrée d'un coup. Elle ne pouvait pas suivre le rythme fluctuant des
difficultés pendant la guerre qui l'a obligée à s’enfermer à la maison. Mais le
soleil qui illumine le mur lui fait sentir qu'il y a toujours de l'espoir.
Julia a
un rêve dont elle ne parle jamais.
A son
avis, celui qui parle trop ne fait rien.
Elle veut
être astronaute mais elle n'aime pas la réaction des adultes qui ne respectent
pas ses rêves et ses ambitions parce qu’elle est petite. Malgré sa taille, elle
est très courageuse. Elle décide de ne pas parler et de montrer à tout le monde
que c'est possible de réaliser ses rêves. En regardant la lune, elle croit
encore à ses rêves.
Une scène est restée immobile en elle. C'était la
dernière réunion avec ses amis. Elle a dû partir avec sa famille en dehors de
son pays. Pendant son voyage en voiture, sa tête contre la fenêtre, Julia
regardait les arbres, les lacs et le soleil. Elle se rappelait les beaux
moments passés avec ses amis en été. Julia pensait qu'il n’y avait rien de plus
importante qu'avoir des amis qu’on aime vraiment. Alors la lumière du soleil a
allumé son visage et la lumière était toujours là pour lui donner l'espoir
qu’elle les rencontrerait une autre fois. A ce moment-là, elle a décidé de
retourner au pays dès qu’elle en aurait l’occasion.
Pour toi Julia, le pont est toujours là. Tu pensais
que le monde était complexe et déconnecté et qu’il n'y avait pas de liens entre
les pays, les gens et les langues.
Maintenant, tu as découvert que tu te trompais. Il y
a toujours quelque chose de l’autre côté du pont. Tu pourrais trouver ton
identité même dans les endroits que tu avais refusés. La chose plus importante
c'est de savoir à la fin que le monde est connecté même malgré toi.
Julia était stupéfaite par ce qu'on venait de lui
annoncer : la voix d'un policier parlait dans le micro au centre commercial,
annonçant qu'il y avait un petit garçon étranger perdu. Le policier ne pouvait
pas comprendre sa langue étrangère.
Julia était à la cafétéria avec ses amis. Cinq
minutes après, ils ont vu le policier avec le garçon. Le petit garçon étranger
parlait sa langage maternelle mais le policier ne le comprenait pas du tout.
Julia a demandé au petit garçon de venir à leur table. Il s’appelait Dani,
Julia a trouvé que Dani était très triste et il avait peur. À cette époque-là,
Julia avait 18 ans. Malgré son jeune âge elle parlait trois langues. Elle parla
donc avec Dani et appris les noms de ses parents. Elle les donna au policier.
Pendant qu'ils attendaient les parents, Julia a offert à Dani un morceau de
gâteau au chocolat. Elle a essayé de le rassurer. Dani était très heureux. Les
parents arrivèrent et la remercièrent. Après avoir vu les visages des parents
et de Dani, Julia était très heureuse. A ce moment-là Julia a réalisé qu’elle
avait servi de connexion entre Dani, ses parents et le policier. Elle a été le
pont qui a aidé le petit garçon à trouver ses parents.
Julia
s’est rendu compte qu’on ne peut pas vivre sans connexion avec le monde. Elle
s’est rappelée les professeurs et les gens qui l’avaient aidée à apprendre les
langues. Sans eux, elle n’aurait jamais pu être efficace.
Tout d’un
coup, elle a compris que les murs sont peut-être beaux. Mais, sans les fenêtres
qui aident à voir dehors et qui laissent entrer la lumière, l’intérieur serait
un endroit insupportable et sombre. Les langues sont comme les fenêtres : elles
t’aident à te connecter avec le monde. Ce sont aussi les ponts entre les gens.
En même temps, on peut être nous-même les ponts pour aider les autres à
atteindre leurs objectifs.
Les murs sont beaux quand ils racontent des
histoires, entre le passé et le présent. Ce sont les souvenirs. Ce sont des
protections aussi. Les fenêtres, sont le présent et le futur, l'espoir et la
lumière. Ne l'oublie jamais et regarde vers l’extérieur.
*****
« Solitude » Reema OMARI Université de Jordanie, Jordanie
Sous le
ciel, il n'y a rien qui soit stable, rien qui dure éternellement, Elle regarde
le mur et elle se souvient que c'est lui qui la protège. C'est lui qui la
soutient et la rend plus forte. Elle regarde le mur sous le ciel ouvert et se
souvient de son grand-père mort à la guerre et elle pleure.
Elle
était seule, incapable de supprimer les restrictions que la société avait
imposées, elle s'est effondrée jusqu'à ce que le mur s'effondre.
Elle a
un rêve dont elle ne parle jamais parce qu'elle croit que le riche ne parle
jamais d'argent. Celui qui en est privé en parle continuellement.
Mary
est riche de ses sentiments, de ses rêves et de ses dons. Elle rêve de devenir
pédiatre pour aider les enfants du monde qui souffrent comme elle. Mais elle
pense que tout le monde se moquera de son rêve disant qu'elle est incapable de
le réaliser car elle a perdu son pied à la guerre. Pourtant elle est restée
toujours forte et elle garde ce rêve comme un cher secret jusqu'à ce qu'il
devienne réalité.
Elle
attendait son admission à l'université pour étudier la médecine. Elle a attendu
longtemps jusqu'à ce qu'elle se fatigue. Les jours passaient avec difficulté et
la tension était son partenaire. Elle sentait qu'elle était dans une cage et
voulait sortir pour réaliser ses rêves. Elle vérifiait le courrier tous les
jours, jusqu'à ce que son père vienne lui dire qu'elle est acceptée pour
étudier la pédiatrie dans une université en Allemagne. Alors parfois, il faut
sortir des cages dans lesquelles on se met, respirer et regarder dehors.
*
Pour
toi, le pont est toujours là, ne t'inquiète pas pour affronter tes peurs.
Essaie de voir la lumière à travers les obstacles. Tu es plus forte que tu ne
le penses. La capacité est ce que tu es capable de faire. La motivation
détermine ce que tu accomplis. L'attitude détermine dans quelle mesure tu
réalises tes ambitions. Alors fais tout ce que tu peux et ne prête pas
attention à tes peurs, tu vas trouver le pont.
*
Avec la
confiance de son père en elle, elle a commencé à voir la vie différemment. Mary
est devenue pédiatre comme elle le voulait.
*****
« Traverser le mur du destin » Reem ALNATOUR Université Al Zaitounah,
Jordanie
Elle regarde le mur avec chagrin, c'est le mur qui la
sépare de son avenir, c'est le mur qui l'empêche de réaliser ses rêves simples,
c'est le mur que le destin et la société ont construit avant elle, et c'est le
mur qu'elle ne peut pas traverser, ni casser, ce sont les coutumes et
traditions.
Sa vie s'était effondrée d'un coup, elle avait été forcée
à se marier avec son cousin qu'elle n’aimait pas et à un jeune âge. Mais en
même temps elle ne peut pas changer ces traditions. Elle ne peut pas prendre la
décision, elle n’a pas le choix. Elle ne peut pas être libre seulement parce
qu'elle est une fille. Elle regarde encore le mur qui a détruit sa vie.
Elle a un rêve dont elle ne parle pas, Eva, la fille
rêveuse qui rêvait depuis l'enfance de continuer ses études et de se marier
avec une personne qu'elle aime, tout simplement elle rêve de prendre ses
droits, mais elle a toujours peur de les demander.
*****
« Le mur de la maladie » Imane RMAYHI
Université Jinan, Liban
A l’âge de quinze ans, elle découvrit qu'elle avait
le cancer. Elle refusait totalement cette maladie. Elle perdait ses cheveux à
cause de la chimiothérapie. Elle restait à la maison tout le temps, elle
sentait qu'elle était seule et sans force. Sa vie est devenue comme un nuage
noir, qui ne pouvait pas exploser. Elle pensait maintenant à la fin de sa vie.
Elle souhaitait la mort. Elle était seule, déprimée, triste, misérable, là où
se rassemblaient toutes les phrases de tristesse et de chagrin, elle aimait le
noir et détestait tout ce qui inspirait la vie et l'espoir.
Elle regarde le mur. Le mur est un partenaire de son
unité. Elle le regarde et lui parle, une fois avec une larme une fois avec un
cri mystérieux. Ce mur est la séparation entre elle et tous ceux à qui elle ne
peut montrer sa faiblesse, celui qui peut l'entendre à tout moment, même en
pleine nuit, lorsque ses yeux ne peuvent pas dormir.
Maï a toujours pensé qu'elle mourrait, que cette
maladie la détruirait et lui ferait perdre ses rêves. Mais elle dit : "au
moins on peut rêver. Je me rends compte que ce méchant mange une partie de mes
tripes et mange mes rêves, mais moi je peux rêver ». J'espère, sans rêver,
devenir médecin pour traiter les maladies cancéreuses.
Au printemps de son âge, s'ouvre la première fleur
de sa jeunesse. Elle a une belle photo d'elle, dans laquelle elle porte une
robe blanche comme le blanc de son cœur, et sur cette photo, elle se tient dans
un jardin verdoyant. Elle tire espoir, énergie et positivité du confort de
cette scène.
Après plusieurs mois de traitement, douleur,
désespoir et excès de pleurs, après des nuits à perdre espoir, perdre la vie de
la vie, la nouvelle est arrivée "Toutes les cellules cancérigènes ont été
éliminées et vous êtes guéri ». Dieu merci. Elle a commencé à reprendre sa vie
perdue, alors je lui ai dit avec une larme de joie : tu es forte. Tu as pu
faire face à la maladie Tu aimes la vie. Tu réaliseras tes rêves.
*****
“Le
ciel est ton écho”
Laura
Maria MIKHAYEL ELIAS,
Université Saint Joseph, Liban
Fille douce et charmante, comme celle que l’on
imagine dans les contes de fées en s’émerveillant. Telle est Juliette. Elle a
un rêve qui franchit monts et mers, traversant les nuages et se faufilant entre
les étoiles. Juliette fait partie de ces personnes silencieuses, dont le rêve
se traduit par un sourire unique au monde. Dans ce sourire se retrouvent les promesses
de l’aube que portent les doux matins de juin. Pourtant, cet endroit clos dans
lequel elle se trouve l’étrangle. Elle suffoque. Elle a soif d’une liberté
qu’elle ne récupère que dans son lit, nue, seule, attendant sa part manquante.
Sa vie s’est effondrée et plus rien ne peut soigner
son cœur brisé. La chute de ses rêves, le naufrage de ses espoirs ne lui
permettent pas de se réconcilier avec la vie. Il ne lui reste que quelques
débris résultant de son combat avec le destin.
Elle est stupéfaite par ce qu’on vient de lui
annoncer. Dans cette chambre morbide, ses fières ailes sont brisées. La mort de
son père est un coup violent qui paralyse son cœur et son corps. Le gardien de
son âme, l’amoureux désespéré n’est plus. Le vieux chêne lâche son dernier
soupir et vole d’un pas léger semblable à celui qui l’a toujours accompagné.
Ces murs, ces armoires, ce lit, cette solitude... Tous forment un cercle
funèbre comme font dans son village les femmes autour d’un agonisant. Elle
ressemble à ce morceau de viande abandonné devant la boucherie, en attendant
désespérément d’être déchiqueté par les chiens. Le sourire dont elle a
extrêmement besoin a disparu. On lui a volé son dernier espoir, sa dernière
lueur. Elle a froid. Ses pieds recouverts de deux paires de chaussettes
tremblent. Ses lèvres gelées dessinent par leur déchirement les sentiers de
l’eau salée.
Elle regarde dehors, la brise macabre est toujours
là, secouant le vieux chêne.
Depuis, cette scène est restée immobile. Une scène
qui lui est venue à l’esprit dans sa cage. Elle se souvient toujours de cette
chaleur estivale, dure, aigue, verticale qui, pourtant, caressait son front,
son ventre et ses genoux. Avec sa cousine, elle s’était étendue sur le toit de
la petite maison que les vignes protégeaient. Les arbres au-dessus d’elle
étaient entrelacés. Ceci n’avait pas empêché les rayons de soleil d’y pénétrer,
créant un chemin vers le ciel bleu. Les gouttelettes de sueur débordaient de
son corps, mêlées à la crème solaire.
Elle regarde le mur blanc où les restes des
souvenirs sommeillent. Sa famille ne l’a pas appelée depuis des jours. Elle
essaie de cacher ses larmes devant son double. Elle ne croit plus à ces papiers
accrochés sur le mur qui autrefois animaient la chambre. L’un après l’autre tombent
lentement comme les feuilles d’automne et le hasard balaie le reste. Un vent se
lève en cet instant dans sa poitrine et lui chuchote ces quelques mots :
« Pour toi, le pont est toujours là. Un pont de
vent que tu traverses en levant ta plume. Tu es le nouveau Moïse avec ta
nouvelle baguette. Tu as arrêté le trajet d’une tempête. Et ta plume, tu
l’avais dans ta peau. Tu planes dans cet univers libre, dans ce ciel bleu, et
ce pont, c’est toi qui l’as construit. Les cordes du vent, les souffles des
muses, les torrents des dieux t’ont servi. De tes ailes est né un miracle. Tu
voles, le ciel est ta cour, pars où tu veux. Tu dessines, le ciel est ta
fresque, peins ce que tu veux. Tu chantes, le ciel est ton écho, dis ce que tu
veux. Tu rêves, le ciel est ton oreiller, rêve jusqu’au bout. Tu pleures, tes
larmes arroseront les espoirs terrestres et les vœux célestes. »
*****
« Mur » Ghada DAMAA Université de Balamand, Liban
Elle
regarde le mur et contemple les gribouillis tracés par d’autres prisonniers.
Elle déchiffre sans cesse les écritures, les images. Il y a les couteaux, les
émoticônes renfrognés, les cœurs percés de fléchettes avec les initiales des
noms des amoureux. Elle leur donne à chaque fois une nouvelle interprétation et
se laisse aller à son imagination fertile. Cette échappatoire la console et lui
donne de l’espoir. Mais, les privations qui l’aliènent infiniment surgissent aussitôt
et la plongent dans une tristesse accablante.
Sa
vie s’est effondrée d’un coup. Ah ! elle n’aurait jamais imaginé qu’elle endosserait
un tel destin. Mais comment en est-elle
arrivée là ? Elle vit un vrai drame auquel elle n’aurait pu penser même dans
ses pires cauchemars.
À
tout prix, elle veut se réconcilier avec la vie, avec l’avenir. Elle a peur
d’un sentiment d’indifférence qui puisse s’insinuer en elle et tuer ses désirs.
Elle a un rêve de jeunesse, de vie respirée à pleins poumons. Elle veut mener
librement sa vie où plus personne ne lui dicte ce qu’elle doit faire et à
quelle heure elle doit exercer telle ou telle tâche. Elle se voit allongée
nonchalamment sur son fauteuil, les jambes entrecroisées en train de lire les
potins des stars. Elle a tellement envie d’être la fan d’une vedette et de
l’imiter dans ses manières de s’habiller et de se comporter.
De temps à autre, une foule de souvenirs se confondent dans sa mémoire,
mais un seul lui revient sans cesse. Celui de la plage. Elle revoit avec
précision ce souvenir d’enfance qui berce toujours sa mémoire. Elle court vers
l’eau et se lance avec joie dans les vagues. Elle va au rythme des ondulations
et se délecte de l’écume qui lui éclabousse la face. La mer lui procure une
infinie tendresse qu’aucun humain ne peut lui donner. Elle s’agrippe à ce
souvenir qui la dote de tant de force gainée. C’est son unique secours.
Un autre
flash-back marque son enfance : c’est le pont qu’elle traversait pour accéder
aux champs d’oliviers. Ce pont la transportait dans un monde qui suscite en
elle tant de nostalgie et lui procure beaucoup de paix intérieure. Elle lance
avec émotion : Ah ! Pour toi, le pont est toujours là. Il te connecte à ton
passé plein de rêves, d’ambitions, et s’efforce de te réconcilier avec ton
présent, tes caprices inaltérés. Il se tient là, solide et résistant, faisant
fi de l’éphémère des choses. Il t’invite à lutter, à endurer. Nos destins sont mêlés.
Une voix
rauque la réveille tout à coup. Le gardien lui demande de l’accompagner chez
l’officier. Elle sera libérée sous caution ! Elle est stupéfaite par ce qu’on
vient de lui annoncer. Cette nouvelle la désempare complètement. Des émotions
contradictoires émoussent sa joie.
Comment
quittera-t-elle l’intimité de son univers carcéral ? Comment fera-t-elle face
au monde de la réalité austère, blessante ? cette libération ne porterait-elle
pas atteinte à sa paix intérieure, à son recueillement ? Autant
d’interrogations qui l’accablent. Mais, elle a décidé de se donner un long
moment de répit. Elle regarde au dehors.
*****
« Son propre combat » Chaza
HINDI
Université Jinan, Liban
Sa vie
s’est effondrée d’un coup en pénétrant dans ce labyrinthe de pensées. Elle ne
sait pas quand, où et comment toute cette pagaille s’est créée au fond de son
crâne, de son cœur, de son être. Elle s’est juste retrouvée dans ce tourbillon
infini qui la tire sans pitié. Ses chutes psychiques ne font que s’aggraver
avec le temps. La brune au visage juvénile ne veut qu’une seule chose : trouver
cette main qui sera sa lumière dans la noirceur de ses pensées.
Son silence
est pesant limite effrayant. Elle sait que le chemin est long et que les épines
remplissent ses routes. La force manque à Sama, sa vie manque de vie, ses jours
manquent de soleil, son visage manque de sourire et ses rêves manquent
d’espoir. Tout ce qu’elle désire est simple : vivre hors de la noirceur de sa
tête, rencontrer son cœur et donner un sens à ses pas.
Elle
regarde le mur, cet espace blanc qui prend à présent tout son champ de vision.
Elle cherche la paix dans ce blanc, elle cherche l’évasion. La jeune fille
désire trouver ce portail qui vit dans son imagination, une porte vers un ciel
ouvert de réconciliation. Ses pensées vont vers une seule solution : trouver un
moyen de survivre, mettre un contrat clair. Cet accord qui définira sa relation
avec celle qui est à la fois sa pire ennemie et sa plus chère amie : elle-même.
Dans sa
chambre, sur une petite commode à côté te de son lit, se trouve une photo : c’était
l’aube ou bien le crépuscule, ce temps indécis où tout avait l’air si magique.
Un cerf-volant survolait le ciel, une longue ficelle l’empêchait d’être libre
de ses actes. Sur le bout de sa corde, on observait sa dompteuse, une fille
toute petite aux cheveux bruns, son sourire dessinait l’espoir. Une grande
femme qui, on suppose, jouait le rôle de mère dans le portrait, tenait la
petite dans ses mains en lui donnant la position la plus haute. Un arbre avec
des bourgeons annonçait un début de printemps dans l’arrière-plan. Depuis,
cette scène est restée immobile. Sama entend toujours ses rires quand elle
regarde cette image, elle y ressent la liberté et parfois, même si elle n’ose
pas l’avouer, elle la regarde pour respirer l’espoir. *
Ce qui t’arrive n’est pas facile, ce vide, ce noir,
cette vie, tes pensées, ce que tu ressens, ce n’est vraiment pas vivable et je
le sens. Je ressens ton manque d’oxygène d’un coup, je ressens ton manque
d’appétit soudain, je sens la souffrance de ta gorge dans une société qui ne
comprend pas tes larmes silencieuses. Mais pour toi le pont est toujours là. Tu
ne peux pas être un nombre de plus sur cette terre en vain, Sama. Dieu ne va
pas nous créer, nous laisser en vie pour nous faire vivre des problèmes sans
solutions. Chaque nœud a sa manière de dénouement. Tu es une fille magnifique
au fond et je sais que tu es assez courageuse pour prendre ce pas vers ton
avenir. Laisse ton être te tendre la main, elle peut être ton baume apaisant et
cicatrisant appliqué sur ton cœur. Rends-toi à l’évidence et va voir une
personne qui peut t’aider à renouer avec ton passé et avec toi-même. *
Mes mots avaient été entendus. Quelque temps après,
elle sortit de la prison qu’elle s’était construite.
Elle était stupéfaite par ce qu’on venait
de lui annoncer : son visage avait été garni d’un joli sourire, ses yeux
pétillaient de joie et une lueur d’espoir se dessinait sur ses traits. La femme
devant elle tenait fort sa main, elle sentait comme si leur connexion lui
transmettait force et courage pour continuer. Elle se leva rêvant des jours où
elle vivra au maximum, où elle ira à l’université en sachant ce qu’elle veut faire,
où elle cuisinera avec amour et où elle contemplera la nature parmi des
personnes dont elle n’aura pas peur. La psychologue lui avait annoncé qu’il y avait
moyen d’effacer la souffrance du passé, qu’avec son aide elle serait capable de
se remettre sur pieds et encore plus forte qu’avant. Elle n’avait qu’à vouloir
guérir les plaies de son être de tout cœur et parfois même au lieu de regarder
le mur, elle devrait jeter un coup d’œil à la fenêtre et regarder au dehors.
*****
« Départ gracieux » Lina AYOUB
Université Jinan, Liban
En coup de vent, sur un coup de
dés, tout est devenu poussière. Seule restait, accablante, la douleur. Elle
tentait de se nourrir de l’espoir mais elle n’appartenait plus à ses pensées
qui flottaient devant ses yeux comme des images plates, et d’un coup, tombaient.
Ça sentait la chute !
Les yeux ouverts, les bras
ouverts, la poitrine face au vide, elle voulait se jeter du pont, elle voulait
se jeter dans le vide. Elle voulait mettre fin à ses jours douloureux. Elle se
précipita. Elle voulait arriver si vite, avant la mort. Derrière elle, passaient
les jours et les semaines. Devant elle, l’image du monde se reflétait dans
l’eau de la rivière bleue. Elle prit une grande inspiration. Cette nuit-là, le
désir était comme le vent. Ils s’égalisèrent. Ils eurent le même destin, celui
des choses éphémères. Elle était au bout de se jeter, quand une lumière
mystérieuse traversa le vent et le désir et descendit sur sa poitrine. « Aube,
le pont sera toujours là pour toi », s’exprima une voix. Elle paraissait
reprendre conscience et courut. Elle courut de plus en plus rapidement. Ses
respirations se faisaient de plus en plus fort. Arrivée à son petit
appartement, le visage mouillé de larmes, assise à sa fenêtre regardant la vie
dehors, elle n’eut rien à se dire. Elle voulait vivre heureuse dans une maison,
au lieu d’attendre la mort dans une cellule maudite à l’hôpital, en regardant
un mur.
Ses trente années ne passaient
pas. Pourquoi ? Cette question de causalité ne l’avait jamais intriguée. Elle
était toujours cette jeune qui menait une vie épique et éprouvante. Elle était
muette, mais rêveuse.
Elle savait que Dieu existait, mais elle le
cherchait.
Sur cette grande Terre, elle
trouvait toujours un endroit pour elle. Mais, le monde se ressembla subitement.
Elle regardait le mur comme un enfant admirant le ciel ouvert, comme un
condamné à mort regardant l’œilleton en riant sur ses vieux chagrins. En fait,
ses yeux étaient accrochés au mur qui la protège de la pluie mais ne la guérit
pas de la sécheresse du fond. Elle avait un rêve. Elle voulait pousser un
hurlement pour que tous les murs de sa cellule réalisent son existence. Elle
avait un rêve d’être une maman, de donner naissance à un enfant terrible,
stupide, étrange, mais qui apprendrait l’amour d’elle.
Elle savait que c’était la
dernière nuit, et que les derniers instants approchaient. Mais elle ne voulait
pas sentir le dernier souffle en se couchant sur le dos, se nouant les mains,
et regardant un mur, comme si elle avait mille ans. Elle voulait se laisser
traverser par le temps en plein air, les pieds nus, les yeux ouverts, comptant
les étoiles filantes. Elle voulait une mort de jeunesse. Elle voulait une mort
d’une trentaine volée par une leucémie. Elle respira mal. Elle gémit. Elle
sentit un mystère venu des lumières des soirs descendre sur sa poitrine. Elle
trouva Dieu. Le pont était là. Personne ne connaissait ces choses, même sa
maman et ses sœurs qui l’entouraient en pleurant et priant. Elles ne
regardaient pas ces choses, elles l’observaient et attendaient. La douleur
disparut. Elle n’entendit rien. Elle sourit. « Maman, je dois m’en aller ».
Aube ferma les yeux et traversa le pont.
*****
« Une dernier fois, pouvoir regarder au dehors » Lili NAIM Université Saint Joseph, Liban
Ce sont des murs qui protègent mais ne guérissent
pas.
Elle regarde le mur, les yeux fixés sur les pierres
qui l’étouffent.
Ses mains frêles et pâles semblent se creuser comme
une coupe accueillant l’unique lueur d’un soleil timide.
Les enfants terribles finissent là, dans ces prisons
amères et lugubres, elle le sait.
Et ses sanglots, tels des échos désespérés, se
heurtent aux parois sourdes, laissant des traces indélébiles.
Sa vie s’est effondrée d’un coup,
Sans crier gare.
Ses pensées se bousculent, de la tristesse
à la terreur, de l’ennui aux rares moments de joie.
Comment sortir du labyrinthe ? Vers qui se tourner
?
Elle ne craint pas l’avenir. Non.
C’est le présent qui la terrorise le plus,
L’instant, qui comme un vent glacé
transperce les os, la laissant dans l’inertie
Elle a un rêve encerclé par de hautes haies
rebelles,
Qu’elle cache soigneusement entre ses doigts mêlés
et tremblants.
Marie ne peut pas parler. Il y a des mots
qu’elle n’ose même pas dessiner dans sa tête.
Tout ce qu’elle peut faire parfois, c’est
observer à travers ses barreaux la nuit pâle qui l’appelle.
À la surface, sur la rive de sa mémoire.
Figée, et pourtant encore fraîche et mouvante.
Une scène. Elle a peur d’oublier.
Alors parfois, tout doucement, elle se laisse aller
dans le fleuve de ses pensées,
Avec précaution elle remonte dans le temps.
Elle peut voir, les yeux fermés, l’ombre
du chêne sous lequel ils s’asseyaient.
La brise légère, caressant sa peau
d’avant, lui faisait l’effet d’une délicieuse drogue.
Ivre de ses souvenirs qui coulent, alcool
de l’esprit,
Marie s’agrippe à cette image d’eux
couchés sur l’herbe humide.
Elle se sent descendre dans les entrailles de la
terre.
Lui aussi, immobile, comme hypnotisé par le bleu du
ciel qui l’aveuglait.
Les nuages ne bougeaient plus. Leurs corps ne
bougeaient plus.
Seuls leurs yeux glissaient le long du paysage
devenu fade.
La chaude moiteur du temps les enveloppait de fines
gouttelettes nacrées.
Ils étaient heureux.
Tu t’attaches inlassablement à ce lien, ce
nœud qui te serre et t’enlace.
Solidement bâti, inébranlable.
Il demeure, malgré les tempêtes de ton cœur.
Tu danses sans répit, tu danses pour ne
pas t’arrêter… et sentir.
Tu virevoltes, tu tournes encore plus vite, plus
longtemps,
Jusqu'à voir flou.
Les pavés polis sous tes pas te connaissent bien.
Tu attends encore, sans jamais vouloir traverser.
Elle ne sent plus ses jambes.
Ses membres flottent, comme soutenus par une
fine couche d’air devenue visible pour l’œil.
Dans un mutisme presque assourdissant elle tombe,
inconsciente.
Elle espère vivre, elle le souhaite ardemment.
On vient pourtant de lui annoncer une vérité qu’on
ne peut occulter.
Une vérité qui se fond intimement avec la vie,
Marie va mourir. Un peu comme tout le monde.
Elle le refuse,
Avec tant de volonté,
Elle a demandé, une dernière fois,
de sortir de sa sombre cellule, Une dernière fois, pouvoir regarder au dehors…
*****
«
Adagio »
Farah
DHAYBI
Université Jinan, Liban
Les nuages flottent dans un ciel ouvert à toutes
les possibilités. Cette femme est une exception, elle est née sur les
frontières de l'éternité. Se trouver enfermée n'était pas un choix, et se
révolter est dangereux pour une femme comme elle.
Comment se réconcilier avec sa coquille ? Il le
faut puisque dehors il fait froid. Sa vie s'est effondrée d'un coup, devant un
portail épineux. Elle vivait dans son propre ghetto. Elle avait installé un
piano près de son bureau, elle avait écrit des mots près de son tatouage. Les
mots meurent, s'usent sur des feuilles sèches et fleurissent là où les
blessures sont encore fraîches.
Elle a un rêve dont elle ne parle pas. C'est l'un de
ces rêves clandestins qui nous regardent par la fenêtre, et quand on ouvre le
volet il n'y est plus. Lisa avait un petit poisson rouge comme ami. Elle le
contemple chaque matin, pourvu qu'il s'envole. “Si un poisson de bocal pouvait voler,
je pourrais certainement déployer mes ailes un jour”. Elle l'a adopté l'été
dernier près d'un fleuve, c'était une journée où elle avait décidé d'écrire.
Son stylo passait et repassait sur sa feuille comme on repasse le linge. La
rosée ruisselait sur ses prunelles teintées par les rayons de l'enfer. Elle se
lavait les pieds nus par quelques huiles prodigieuses qu'elle avait extraites
d'un olivier près de sa maisonnette de campagne. Une brise froide souffla. La
bouteille coula. Elle ne voyait plus son reflet. Elle voulait rejoindre l'autre
bout de la rive pour sauver cette image qu'elle avait en tête. Lisa périra
avant même d'y arriver, mais son reflet, lui, restera. On le verra flotter sur
la surface, et elle franchira le ciel.
Pour toi, le pont est toujours là, tu n'as qu'à
allumer une bougie et suivre ta voie, remplis aussi ton panier et n'oublie pas
tes chansons préférées. Tu ne sais jamais où tes traces vont t'emmener. Lisa ne
croyait pas aux chances, elle ne les saisissait pas, elle les chassait comme
des mouches. Fallait-il crever lentement pour se sauver soimême ? Elle s'est
confinée pour ne pas faire face à la fatalité de son destin. Ses barreaux, son
poisson, son piano, c'est tout ce qui lui reste. Et bien sûr, un stylo penché
sur la table qui regarde au dehors.
*****
« Réconciliation avec le rêve » Chantal BITAR Université de Balamand,
Liban
Elle regarde le mur, aujourd’hui blanc, de la chambre
à coucher de ses parents. Au-dessous de cette couche de peinture gisent sa
princesse couronnée dans son jardin de couleurs, et aussi son poème. Elle avait
cinq ans et elle les eut à peine terminés qu’une tape dans la nuque vint la
propulser vers ce même mur. Elle retourne la tête, un cadavre git dans un lit
déformé par un sursaut d’agonie. Le premier objet à sa disposition, une lime à
ongles, lui sert à écailler ces pellicules blanches et déterrer son rêve.
Sa vie s’est effondrée quand elle a arrêté
de rêver, quand elle a compris qu’elle n’était pas une princesse que les vrais
parents allaient finir par retrouver, quand elle a compris que ses ailes n’étaient
pas assez fortes pour lui permettre d’échapper à ses bourreaux et à ses murs.
Rêves, c’est son prénom, a un rêve dont
elle ne parle pas, elle vient de lui donner vie, et c’est désormais à lui de
parler, de battre des ailes et de partir loin, au-delà des murs.
Depuis, cette scène est restée immobile.
La libération, l’a-t-elle surnommée. C’est le jour où elle a réussi à affranchir
son rêve. Une image stroboscopique où les écailles de peinture volaient dans
son atmosphère propre, comme si elles échappaient à un pissenlit sur lequel
elle venait de souffler. Elles se rassemblaient autour d’un joli minois ébahi.
C’est étrange. Elle n’a jamais cessé de regarder cette image immobile, mais à
chaque fois, la poussière laisse voir une chose en filigrane. Aujourd’hui elle
voit des ailes.
Pour toi, le pont est toujours là, et il y restera.
Regarde ! N’aie pas peur ! Il suffit de faire le premier pas. Ils sont jolis
les ponts, ils te permettent de passer dans les deux sens.
Elle était stupéfaite par ce qu’on venait de lui
raconter. Il aurait parié sur sa défaite ? Les idées et les mots ont des ailes,
personne ne peut les empêcher de voler. Elle regarde dehors, elle les voit
voler – ses mots volent.
*****
« Tristesse » Mirna Bou Nassif
Université Islamique, Liban
Elle
regarde le mur. Elle se souvient des rires et des souvenirs qui accompagnaient
ce mur. Et ses yeux pleurent. Tous les beaux moments étaient ici sous ce ciel
ouvert avec son ami. Mais malheureusement ces joies ont disparu en un clin d'œil.
Sa vie s'est
effondrée d'un coup lorsque la mort a frappé à sa porte. Elle a perdu une
partie d'elle, une partie à laquelle elle ne peut pas renoncer, mais maintenant
le regret est inutile. L’accident l’a précipitée dans la peur, la tristesse et
les larmes.
Elle a un
rêve dont elle ne parle pas. Le rêve de sa vie est de revoir son ami décédé qui
a passé tout son temps avec elle près de ce mur. Maintenant, le monde de
Mélanie ressemble à un trou vide, et la tristesse est devenue le titre de sa
vie. Elle suivra son chemin toute seule.
*****
« Incomplète » Dina MAKKI
Université islamique, Liban
Elle regarde le mur avec une grande tristesse.
C’est là où elle a dessiné ses souvenirs avec son chéri. Ce dernier a pollué
ses mains en tuant quelqu’un et il se retrouve en prison. La nuit est si calme.
Son absence la tue, elle se sent incomplète.
Tout est devenu sans sens. Elle a perdu le goût de
la joie. Ses larmes sont devenues les bijoux qui décorent sa journée. Et,
l’écriture est son seul refuge pour oublier son chagrin, ses regrets et sa
peur.
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